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AFRIQUE

Sa mort nous condamne par défaut !


Alwihda Info | Par Pape NDIAYE - 21 Juin 2014



Mosquée de Sacré-Cœur III-Vdn, nous sommes à la grande prière de la Tabaski ou Aid El-Kabîr. Une atmosphère de dévotion règne sur les lieux. En solo, les  fideles perpètrent la nafila des deux « rakaas » en attendant la prière. Dans le lot, Me Moustapha Diop, un célèbre voisin  puisque sa deuxième épouse habite le quartier.  En compagnie de son fils, à peine âgé de 10 ans, « Maître », comme on l’appelle, distribue des regards appuyés par des sourires dans toutes les directions, histoire de saluer ses nombreuses connaissances. Silence de chapelets oblige !  Dans cette atmosphère de recueillement, une scène discrète, mais affective attire l’attention de beaucoup de fidèles dans cette communion où Dieu se faisait sentir.  Entre Me Moustapha Diop et son fils, une petite brèche provoquée par un tapis de prière que l’enfant avait mal joint à celui de son avocat de père. Soudain, une connaissance essaye de boucher cette brèche dans le « sappé ». Face à cette tentative, l’enfant s’y oppose à sa façon c’est-à-dire se colle précipitamment à son papa. De loin, il fusille  du regard l’homme qui voulait le séparer de son père le temps d’une prière.  A cet instant précis, toute  une philosophie s’invite à nous : A un certain âge,  ô combien l’enfant est très attaché à son père ! 
 
C’est pourquoi, quand la nouvelle de la mort de Me Moustapha Diop est tombée, cette scène m’est revenue immédiatement à l’esprit. D’abord, j’ai pensé au môme que le Bon Dieu a séparé de son père mettant ainsi fin à une relation paternelle jusque-là heureuse car sans nuages. Une rupture très douloureuse.  Puis à l’éminent avocat, notre avocat à nous ! Nous les turbulents du « Témoin »  dont il a été  le premier avocat défenseur durant les années turbulentes. Et jusqu’à une certaine période où Me Moustapha Diop s’est retiré de nos procès pour faire valoir sa sagesse. Sous cette posture, j’ai eu à l’interpeller un jour en ces termes : «  Maitre, pourquoi  ne défends-tu plus « Le Témoin » ? ». Avec le sourire que l’on lui connaissait, il avait répliqué  en me donnant une tape amicale sur l’épaule : « La bonne question serait plutôt de savoir pourquoi je n’ai jamais accepté un dossier contre « Le Témoin » ? Pourtant, Dieu sait que j’ai toujours eu des clients  qui voulaient me constituer contre « Le Témoin », mais j’ai décliné leurs offres, aussi mirobolantes fussent-elles ! Par principe, je ne prends jamais un dossier contre mes amis et frères du « Témoin ». Et quand je me retrouve entre deux « feux » ou deux amis, je préfère jouer aux sapeurs pompiers… » me disait-il lors de notre dernière rencontre.  Ça c’est du Moustapha Diop ! Il s’en allé… lui, le brillant avocat certes, mais surtout l’excellent médiateur. Un grand procédurier, toujours prêt à traquer les nullités d’un dossier. 
 
 Agé de 63 ans, Me Moustapha était une très grande voix du barreau de Dakar.  Présent dans la plupart des grands dossiers pénaux de ces dernières décennies, il a su forger sa réputation sur la base des principes. Il était plus un avocat des justes causes qu’un défenseur des célébrités. A preuve, au départ de l’affaire Me Aïssatou Guéye Diagne notaire, il était dans un collectif, mais à l’arrivée, il ne restait plus que lui pour défendre la notaire.  « Aissatou, tiens bon ! Je vais continuer à te défendre jusque dans ma tombe… » a-t-il dit, histoire de rassurer Me Aissatou Gueye Diagne qui l’avait évacué à l’hôpital avant de lui rendre une ultime visite à quelques heures de sa mort. 
 
Avec cette mort, c’est toute une clientèle qui se sent condamnée par défaut ! Défaut de ne plus pouvoir bénéficier des services de cet avocat hors pair… Un avocat dont la seule présence à la barre suffit à rassurer le  prévenu le plus craintif…
 
A ses veuves et à ses enfants, à ses amis et parents, à ses confrères et clients, « Le Témoin »  présente ses condoléances attristées. Que la terre de Yoff lui soit légère ! 
 
Pape NDIAYE   
« Le Témoin » N° 1169 –Hebdomadaire Sénégalais ( JUIN  2014)



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